Lumière pour le monde –
La coutume de placer au moment de Noël un sapin dans les maisons, dans les églises, ou, à l’extérieur, sur les places publiques, est relativement récente ; elle date peut-être du 16ème siècle. Il semble que l’origine en soit germanique. Ce beau symbole fait régner une atmosphère de fête dans toute la cité des hommes. Il porte la lumière de Noël et du Sauveur dans le monde. On dira que c’est païen : est-ce une critique ? Païen vient de paysan, et évoque la tradition rurale et cosmique, grande richesse de tous les peuples, s’ils ne l’ont pas perdue.
Histoire des religions
Le grand anthropologue roumain Mircea Eliade, à qui Dieu accorde le repos, a développé le symbolisme de l’arbre (Traité d’histoire des religions, Payot, Paris, 1948, ch. VIII). Celui-ci est le cosmos, la vie, le centre du monde, le support de l’univers, le lien entre les hommes et entre le ciel et la terre, la résurrection de la végétation ou bien, dans le cas, du sapin toujours vert, la permanence de la vie et du temps. Il est un microcosme. Il signifie la possibilité pour l’homme d’acquérir la connaissance dont la Divinité est la source. Et il est également une théophanie, manifestation de la Divinité et de ses puissances.
L’Arbre de Vie
« Le vrai bois de la croix ressuscite les morts et Hélène, mère de Constantin, le fait rechercher. Ce bois doit son efficience au fait que la Croix a été faite de l’Arbre de vie qui était planté dans le Paradis » (p. 250). Pensons également à l’arbre de Jessé qui à son sommet porte le Christ. Il y a ainsi une connivence entre l’arbre du Jardin primordial, l’arbre de la Croix, et le Christ, « Rejeton de la racine de Jessé » (Isaïe 11). Nos sapins de Noël ne portent-ils pas des boules de couleur rouge ou verte qui évoquent le fruit ancestral ? Autour de cet arbre primordial, la famille réunie évoque Adam et Ève régénérés par le Christ. Selon certains, l’arbre de la connaissance et l’arbre de vie ne forment qu’un seul et même arbre. Et cet arbre est défendu, selon Eliade, par le serpent, l’esprit déchu, qui veut s’en approprier les fruits et en priver l’homme. « Il voulait acquérir l’immortalité pour lui […] et il lui était nécessaire de découvrir l’Arbre de Vie, dissimulé dans la multitude des arbres du Paradis, pour pouvoir goûter, lui, le premier, à ses fruits ; c’est pourquoi il incite Adam à « connaître le bien et le mal » ; Adam, par sa science, lui aurait révélé l’endroit où se trouvait l’Arbre de Vie » (p. 247).
Nos beaux sapins
Ils n’ont l’air de rien, nos beaux sapins, en vente dans les grandes surfaces… Et pourtant, ils s’offrent à notre méditation, à notre vision biblique du monde. Dans plusieurs récits traditionnels, « l’immortalité – continue Eliade – s’acquiert difficilement ; elle est concentrée dans un Arbre de Vie (ou une Fontaine de Vie), qui se trouve dans un endroit inaccessible (au bout de la terre, au fond de l’océan, au pays des ténèbres, au sommet d’un mont élevé, ou dans un ‘centre’) ; un monstre (un serpent) garde l’arbre ; et l’homme qui, non sans de multiples efforts, a pu s’approcher de lui, doit lutter avec le monstre et le vaincre pour s’emparer des fruits de l’immortalité […] Adam a été vaincu par la ruse du serpent qui l’a induit à se rendre semblable à Dieu, l’a incité à enfreindre l’ordre divin et l’a condamné ainsi à la mort » (p. 247).
Le Sauveur
Le Christ, nouvel Adam, est Celui qui est vainqueur du serpent enroulé autour de l’Arbre ; Il rend ainsi à tout homme le libre accès à la connaissance et à l’immortalité – au Royaume, ce grand arbre où nichent tous les oiseaux du ciel (Matthieu 13, 31). Crucifié sur l’Arbre, Il a vaincu la mort. Le sapin annonce la Résurrection ; il fait le lien entre Noël et Pâque. Une suggestion : accrocher dans nos sapins de petites icônes des prophètes, de la Mère de Dieu, des saints, et du Christ lui-même…