Si je me convertis à l’Orthodoxie, est-ce que je pourrai communier à la messe catholique en semaine, et le dimanche dans une église orthodoxe ?
[…] Votre question est souvent posée, surtout dans le contexte de dispersion ecclésiale qui est le nôtre en Europe occidentale.
Il est tout-à-fait miraculeux que le saint Esprit vous guide vers l’Église des Pères et la confession, avec eux, de la vraie foi. Ce même Esprit saint veut illuminer votre conscience entière par l’évidence de la vérité, et Il vous « interpelle », comme vous le dites si bien, par la mystique orthodoxe.
Comme vous le pressentez, l’entrée en communion avec la Tradition ancestrale est une expérience globale, un investissement de tout notre être, âme et corps, et cela va avec des choix qui ne sont pas toujours confortables même s’ils sont immédiatement gratifiants ! Il y a des pays où les Orthodoxes, loin de l’église, font 10 kms à pied le dimanche, en sabots, leurs chaussures à la main pour ne pas les user, et rejoignent l’église du village le plus proche ! Ils n’envisageraient pas de communier en dehors de leur Église, même dans des régions où les Orthodoxes sont minoritaires.
La question, pour vous comme pour nous-mêmes, est celle du choix d’Orthodoxie, l’unité de la mystique, de la foi, du culte et de la vie. C’est une question, non d’autorité extérieure – car cela ne se pose pas ainsi dans l’Église – mais d’autorité intérieure; pour chaque Orthodoxe, la plénitude de la présence du Christ dans son Église par le saint Esprit est là où la foi a été confessée de façon inaltérée et ininterrompue jusqu’à nos jours; là où la Tradition a été, comme son nom l’indique, transmise par l’Esprit saint sans addition, sans innovation, sans retranchement, dans les domaines du culte, des sacrements, de l’ascétisme, de la « spiritualité », de l’interprétation même du mystère de l’Église.
La communion dans l’Église orthodoxe est la communion à tout ce que confesse et à tout ce qu’expérimente l’Église par la foi et par la vie. La sainte communion est un acte ecclésial et ne peut être déconnectée du corps de l’Église: elle est communion au Christ, à l’Église qui est son Corps universel, et, dans l’Église, à son corps personnel qui s’y trouve présent par le saint Esprit. Là où nous participons à l’Eucharistie, nous participons à tout ce qui est enseigné et fait, nous mettons notre confiance dans les évêques sous l’autorité desquels ces actes et ces enseignements sont délivrés. La communion n’est pas un acte subjectif en soi-même qui pourrait être isolé de la communauté de foi; pour cette raison, le fait-même de communier constitue un engagement irréversible. Si des personnes qui ne sont pas encore Orthodoxes ne sont pas reçues à la sainte communion, c’est bien parce que, ne faisant aucun prosélytisme, nous leur laissons le temps de mûrir leur choix et de se situer dans l’unité de foi avec l’Église des Pères. C’est le rôle des prêtres en particulier de les y préparer s’ils le souhaitent.
Ce n’est donc pas une autorité canonique qui doit vous dire si vous pouvez communier tantôt dans l’Église totale et tantôt dans une Église particulière séparée librement de cette totalité, comme s’il y avait équivalence ecclésiale et « compatibilité »; c’est, dans votre for intérieur, l’évidence que veut vous donner le saint Esprit; mais c’est pour cette même évidence qu’aucun père spirituel ne donnera la bénédiction à un fidèle pour qu’il sorte de l’Église en communiant dans une communauté qui n’a pas encore retrouvé avec elle l’unité de foi et de tradition. Comprenez-vous? Le plus urgent, nous semble-t-il, est d’acquérir le sens réel et orthodoxe de la sainte communion, comme célébration et confession communes, comme acte du peuple sacerdotal de Dieu.