La souffrance transfigurée par l’amour –
Avec une préface de Bertrand Vergely et un lexique des termes spécifiques, ce nouveau livre prolonge, après Le Sacrement de l’Homme (« Patrimoines », Cerf, Paris, 2021) – une étude d’anthropologie chrétienne – la contemplation du mystère de la souffrance transfigurée par l’amour. Le Christ, le Fils unique de Dieu, est au centre de cette exploration : c’est Lui, comme le dit la sainte Liturgie, qui offre et qui est offert, qui reçoit et qui se distribue. La question de la souffrance est moins une question de sens que la réalité de la présence : le Christ est Dieu le Verbe fait chair et fait homme. A ce titre, Il est présent parmi les hommes, au milieu d’eux et à l’intérieur même de la condition humaine. Il est présent à l’intérieur de nos joies et il est présent à l’intérieur de nos douleurs et de notre souffrance.
La joie de la compassion
Toutefois, Il n’est pas présent comme quelqu’un qui subit. Le Christ n’a rien subi ; Il a tout choisi par amour. Et en faisant par amour, et comme Amour en Personne, le choix de vivre ce que vivent les hommes, Il transfigure ce qu’ils vivent par l’amour. Le sacrifice non sanglant qui est celui de l’Offrande eucharistique est précisément la transfiguration de la souffrance par amour et en amour. L’oblation du Fils est le mode divin d’exister : une impensable abnégation de soi, une indicible préférence d’autrui à soi-même, et la joie de communier par compassion à ce que vit l’homme pour le faire communier à sa propre divinité. Dieu, en se faisant chair, fait sienne la souffrance humaine, Il la sanctifie et la déifie sur la Croix, par sa Résurrection et son Exaltation : et, en même temps, Il ne la dépossède pas de sa réalité humaine. La condition humaine, dans ses divers registres, est le lieu de la rencontre, du dialogue et de la communion de Dieu et de l’homme.
La personne-hypostase
Pour cette raison, L’Offrande du Fils donne la première place à l’exploration du mystère de la personne ou hypostase créée, celle de l’homme. On revient ici sur des thèmes anthropologiques incontournables, tous ceux qui sont liés à la prophétie prononcée par le Créateur : « faisons l’homme à notre image et en vue de notre ressemblance ». La personne humaine peut répondre à l’invitation de la personne divine. Le dialogue interpersonnel de Dieu et de l’homme est au cœur de l’histoire universelle. Et ce dialogue a lieu au milieu des joies et des peines humaines. Bien plus, le livre tend à le montrer, notre capacité à devenir vraiment personnels, c’est-à-dire à ressembler à Dieu, trouve, dans la souffrance vécue avec foi, le lieu mystique et existentiel le plus puissant. Loin d’une conception pénale et expiatoire de la souffrance, la tradition patristique voit dans la souffrance le rendez-vous divino humain.
La glorieuse souffrance de la Mère de Dieu
Des passages importants du livre sont consacrés à la Mère de Dieu. A la suite du grand théologien Dumitru Stàniloae, dont l’enseignement est suivi tout au long de L’Offrande du Fils comme dans Le Sacrement de l’Homme, il est montré que la Vierge Marie inaugure le statut nouveau de l’humanité et, particulièrement, le statut nouveau de la souffrance. En purifiant la Vierge, le Christ a simultanément purifié toute la créature humaine en son sein. Sa Pâque purificatrice et libératrice commence dans l’Incarnation et de façon spécifique dans le sein même de la Vierge. Celle-ci, dans les souffrances qu’elle connaît, souffre dans un corps et dans une âme déifiés, première à porter les fruits personnels de l’Incarnation.
L’accompagnement dans la foi
La place incontournable de la Mère de Dieu pour la foi dans le Christ Sauveur et dans toute l’économie du Salut nous a conduits à insérer en annexe un texte inédit de l’archiprêtre Serge Boulgakov, à qui notre étude doit beaucoup : « La Croix de la Mère de Dieu ». Dans ces pages traduites pour la première fois par Madame Irène Sovère que nous remercions ici, comme dans l’ensemble de L’Offrande du Fils, on comprend que la personne humaine, au lieu d’être écrasée par l’épreuve, peut, au contraire, par la foi et par l’union intime au Verbe incarné, traverser les circonstances qui pourraient la déshumaniser, pour devenir de plus en plus humaine, à mesure où elle ressemble à l’homme parfait, le Dieu-Homme. L’accompagnement chrétien, non seulement des mourants, mais de chaque personne sur son chemin, trouve dans ces pages, pensons-nous, une nourriture substantielle.