Ignace IV Hazim est né en 1921 au village de Mhardé, près de Hama (Syrie). Il fait à Beyrouth des études secondaires et supérieures (licence ès lettres) et s’engage en 1942 dans le Mouvement de la Jeunesse Orthodoxe du Patriarcat d’Antioche (MJO) qui va provoquer la renaissance spirituelle et pastorale de cette Église. Devenu diacre, il est envoyé à Paris où il étudie la théologie à l’Institut Saint-Serge. De retour au Liban, ordonné prêtre, il fonde dans le nord du pays l’Institut théologique Saint-Jean-Damascène, à Balamand, le Belmont des Croisés :
C’est à Balamand qu’on retrouve encore
une odeur d’Antioche et de sycomore,
de foule impériale et du Chrysostome,
de Constantinople aux toits polychromes.
Un séminariste cout sous le préau,
son ombre sautille comme un gros moineau… (Nadia Tuéni)
Ignace Hazim devient évêque en 1961, puis métropolite de Lattaquié où il occupe son siège en 1970. Il est élu patriarche en 1979. Son Église se trouve en Syrie (plus d’un million de fidèles), au Liban (env. 400 000), en Irak, Koweit et dans les pays du Golfe (env. 20 000) et surtout dans la diaspora planétaire, européenne, américaine, australienne (2 à 3 millions).
Le patriarche a encouragé au Liban un grand effort pédagogique (multiplication des écoles), intellectuel (maison d’édition An-Nour, « La Lumière », qui publie en arabe les textes fondamentaux du christianisme), médical (création de l’hôpital orthodoxe Saint-Georges). Il établit une Université complète à Balamand. Il a été co-président du Conseil Œcuménique des Églises au Moyen-Orient.
Il y a un incendie dans la lumière…
Devenir l’envers d’un sanglot… (Nadia Tuéni).
La grande affaire d’une « Église des Arabes » ne peut être que la rencontre avec l’Islam. Ce dialogue, sur le plan théologique et spirituel, a été surtout mené par un grand évêque, souvent bras droit du Patriarche, le métropolite Georges Khodr’. Au cœur de la tragédie libanaise, Ignace IV a choisi de défendre, par la non-violence et dans un esprit de conciliation, l’unité et l’indépendance d’un Liban pluraliste. En 1989, au temps des bombardements, il a tenu à célébrer Pâques au Liban. A la préoccupation constante de celui-ci, il joint celle de Jérusalem : « Jérusalem a un visage spirituel, religieux, humain. » C’est une « cité de prière » et les relations entre les hommes devraient y être d’abord de « foi et de spiritualité ». « À Jérusalem, nous sommes en quête de la face du Seigneur, au Liban aussi. »
Reconstituer l’Église des Arabes, laisser transparaître, au sein même de l’Islam, par le service et par l’accueil, le visage du Dieu crucifié, lutter patiemment pour la paix, tel est, me semble-t-il, le dessein du patriarche Ignace IV. Dans le Proche-Orient d’aujourd’hui, pareil chemin ne peut être que de passion et de compassion… (Olivier Clément)